Sektarism — Fils de Dieu

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Pour tout dire, j’ai toujours eu un fort a priori avant chaque écoute d’une nouvelle sortie de Sektarism. Cela ne m’a pourtant jamais empêché de me plonger dans chacune d’elles, mais c’était en grande partie dû à mon attirance pour les différents concepts mis en musique par le groupe et l’espoir, bien réel, qu’un jour leur labeur m’emporterait. Malheureusement, la formation toulousaine, bien que talentueuse, n’a jamais su trouver en moi un adepte de son culte. Il m’a toujours manqué quelque chose, une certaine forme d’équilibre, nécessaire, il me semble, même lorsqu’il s’agit d’une proposition artistique qui se veut être plus qu’une simple approche musicale extrême et hermétique. J’ai d’ailleurs invariablement préféré l’expérience live aux efforts studio. Plus complète, plus équilibrée et souvent plus authentique à mon goût, elle permet d’englober dans son ensemble l’univers aussi dense que sombre de Sektarism. Ainsi, lorsque j’ai vu passer sous mon nez le Fils de Dieu, je me suis de suite rappelé ma réaction à l’écoute de leur dernier opus. Le ravissement tant attendu n’avait pas eu lieu à la sortie de La Mort de l’Infidèle et il était assez surprenant de constater l’arrivée d’un nouveau brûlot un an à peine après la sortie du précédent. C’est donc d’une oreille d’autant plus attentive que je me suis lancé à l’assaut d’un chemin de croix auquel je ne m’attendais plus.

Il est toujours assez difficile d’écrire quoi que ce soit de cohérent et de faire passer un ressenti intéressant à lire, lorsqu’on traite d’une musique à ce point jusqu’au-boutiste. D’autant plus quand elle l’est dans chacun de ses aspects, à tel point que notre jugement relève uniquement d’un contexte spécifique propre à chaque écoute. Mais, il m’a semblé presque impossible, et ce dès la fin de ma première séance, de ne pas écrire quelques lignes sur le rapport que j’ai tissé avec cet album. Sektarism s’est toujours voulu grand prédicateur d’une marche ultime vers l’infamie totale, dans une forme de dévotion et d’oubli de soi, qui transpire littéralement de sa musique et, dans un cadre plus large, de son art. Partant de ce postulat, le groupe s’est engagé dans la voie profondément casse-gueule, mais qui lui colle si bien à la peau, du funeral doom à grosse tendance rituelle voire bruitiste. Ce dernier point va me permettre de rentrer dans le vif du sujet, en commençant par parler du rendu sonore de cet album. Je ne connais pas le processus d’enregistrement de Sektarism, néanmoins s’il y a une chose qui m’a tout de suite mis à l’aise c’est bien l’aspect live de cet album studio. Caractéristique essentielle qui en fait une œuvre aux abords particulièrement cinématographique. Ce sentiment ne m’a pas quitté, de la première à la dernière seconde, tant la production accompagne magistralement bien une montée en puissance quasi palpable, si bien que j’aurais aimé la voir se dérouler physiquement sous mes  yeux. Dans une telle situation, que reste-t-il à l’auditeur pour épancher ce besoin de ressentir, dans la totalité de ses sens, une œuvre musicale ? Il lui reste principalement son esprit et c’est en ça que réside, à mon avis, le génie de ce Fils de Dieu. Il en devient, par ce processus purement imaginatif, un objet absolument singulier pour l’auditeur qui se laissera emporter dans ce rituel, aussi violent que douloureux.

Ainsi, chacun en viendra à faire sa propre interprétation des deux titres que propose Sektarism sur cet opus. Deux compositions qui forment un tout cohérent et indissociable, une sorte de marche méditative et funeste menant tout droit à la déchéance, puis au néant. Une fois la descente entamée, on ne revient que très difficilement sur ses pas, comme hypnotisé, contraint d’avancer. Le voilà ce fameux équilibre tant attendu ! Avec cette introduction sous forme de mantra hurlé, propre à mettre l’auditeur dans une sorte de transe religieuse, Sektarism pose une ambiance absolument délétère aux accents de pénitence. Vous accompagnant, de ses tambours et de ses chaînes, en direction d’un Golgotha spirituel où vous contemplerez, dans un ravissement funeste, votre propre crucifixion. Cette materia prima qu’est votre esprit, Sektarism vient, dans un premier temps, y effectuer une fumigation rituelle, l’arrachant au monde profane pour ensuite le déchirer violemment dans une déferlante autrement plus métallique. Les guitares se font ainsi de plus en plus présentes, apportant un regain d’intensité, mêlant harmonie et dissonance dans une simplicité parfaitement appropriée. De son côté, le chant, toujours aussi aliéné, se fait rapidement plus carnassier, entre hurlement et catéchèse sinistre. Le tout, dans une cohérence totale, reste porté par une ambiance de sidération mystique absolument saisissante, transformant définitivement Le Fils de Dieu en une passion éprouvante pour laquelle aucune catharsis ne semble exister. A fortiori, la montée jusqu’au sommet du crâne se fait au travers d’une douleur qu’on en vient à chérir dans une forme d’exultation qu’on aimerait sans fin. Sur ce point, là aussi, Sektarism a su trouver l’équilibre. Par sa durée qui n’excède pas les 45 minutes, ce nouvel opus n’est jamais dans la surenchère, ni dans la monotonie, allant chercher l’essentiel et le primitif au plus profond de son art pour ainsi transfigurer une expérience d’écoute en une épreuve extatique.

Cet album témoigne, à mon sens, d’un tournant dans la discographie de Sektarism, qui a su trouver avec Le Fils de Dieu un équilibre solide entre toutes les composantes de sa musique. Cette nouvelle étape est d’autant plus soulignée par le passage chez le label Norma Evangelium Diaboli, qui n’est rien de moins que la maison mère de Deathspell Omega, Drastus et autre Funeral Mist. Trivialités mises de côté, l’écoute de cet album a été marquante à bien des niveaux et se range sans problème parmi celles qui laissent de profonds stigmates. Sektarism a su créer une œuvre totale, radicalement imprégnée d’un art noir séculaire, mariant à cela la pureté d’un black métal authentique et la langueur sépulcrale du doom. En fin de compte, l’essentiel est bien simple. Il n’est autre que cet album, au-delà d’être un excellent disque de musique, a su provoquer en moi ce sentiment de ferveur et d’ivresse spirituelle qu’on appelle la foi et qu’on désire ardemment à l’écoute d’une œuvre de cette trempe. Merci à eux.

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Label : https://www.noevdia.com

Samuel

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